Dossier scientifique du projet de recherche

 

 

Contexte scientifique général du projet :

L’Education Thérapeutique du Patient (ETP) a été définie par le Bureau européen de l'OMS en 1998 comme devant « permettre aux patients d'acquérir et de conserver les capacités et compétences qui les aident à vivre de manière optimale avec leur maladie » (1). Il s'agit d'un « processus permanent, intégré dans les soins et centré sur le patient ». L'ETP comprend « des activités organisées de sensibilisation, d'information, d'apprentissage et d'autogestion et de soutien psychologique concernant la maladie, le traitement prescrit, les soins, le cadre hospitalier et de soins, les informations organisationnelles et les comportements de santé et de maladie », elle vise à « aider les patients et leur famille (et/ou entourage), à comprendre la maladie et le traitement, coopérer avec les soignants, vivre plus sainement et maintenir ou améliorer leur qualité de vie ».

 

A partir de cette définition, la Haute Autorité de Santé (HAS) et l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé (INPES) énonce des recommandations (2) en 2007 qui visent à aider les professionnels de santé dans la mise en œuvre de ces programmes personnalisés d’éducation thérapeutique en s’appuyant sur le repérage et le développement des compétences de la personne malade dans l’expérience et la gestion de sa maladie. c’est la loi HPST (3), grâce à deux décrets d’application du 2.8.2010 qui en a favorisé l’application en France.

 

La démarche d’ETP vise deux finalités :

- l’amélioration de la santé physique du patient (biologique, clinique)

- l’amélioration de sa santé psychosociale, de sa qualité de vie et à celle de ses proches

 

La première cible l’acquisition et le maintien par le patient de connaissances et compétences d’autosoins, parmi lesquelles l’acquisition de compétences dites de sécurité qui visent à sauvegarder la vie du patient, comme par exemple : « apprendre à repérer ses signes de décompensation, savoir quoi faire en cas de crise».

La seconde vise la mobilisation ou l’acquisition de compétences d’adaptation qui s’appuient sur « l’expérience antérieure du patient et font partie d’un ensemble plus large de compétences psychosociales » (2). Elle vise également à prendre en compte les émotions et les représentations des personnes afin d’aider la personne à « cheminer » dans ses processus de « guérison » et « d’acceptation ».

Notre projet s’inscrit particulièrement autour du second axe, s’appuyant ainsi sur les recommandations de l’HAS-INPES qui stipule que « tout programme d’éducation thérapeutique personnalisé doit prendre en compte ces deux dimensions tant dans l’analyse des besoins, de la motivation du patient et de sa réceptivité à la proposition d’une ETP, que dans la négociation des compétences à acquérir et à soutenir dans le temps, le choix des contenus, des méthodes pédagogiques et d’évaluation des effets. » (2)

 

L’éducation thérapeutique présente 4 axes d’intervention :

·         Les actions de sensibilisation qui visent à renforcer la motivation des personnes à prendre soin d’elles-mêmes (entretien motivationnel par exemple)

·         Les actions d’information qui visent à renforcer les connaissances des patients et leur compréhension de la situation (renforce le sentiment de contrôle)

·         Les actions d’apprentissage qui visent à renforcer les compétences des patients d’autosoin et d’adaptation (mises en situation, expérimentations, …)

·         Les actions de soutien psychosocial qui visent à prendre en compte les émotions, le vécu, les difficultés, à travailler les représentations des personnes pour améliorer leur bien être psychologique et social (relation d’aide)

 

Aujourd’hui, notre intention est de soutenir le renforcement et l’acquisition de compétences d’adaptation et de travailler les émotions et les représentations des patients en proposant des activités médiatrices créatives.

Notre projet souhaite questionner le lien entre ces activités créatives et ces 4 axes de l’ETP : en quoi la Fabrique Créative de Santé participe-elle au renforcement de la motivation des patients ? A l’acquisition de connaissances ? Au renforcement des compétences d’adaptation ? A l’évolution des représentations et des affects des patients ? Et quels sont les liens avec une amélioration de la vie quotidienne de la personne avec sa maladie ?

 

Pour ce faire, et nous en exposerons les détails ci-après, nous opterons dans notre démarche pour une recherche-action dite également « participante », fondée sur l’idée que dans le cadre de l’expérimentation sociologique la recherche et l’action peuvent être unifiées au sein d’une même activité. Sa méthodologie est différente des sciences « dures » et fait appel à des notions telles que l’intériorité, le non-déterminisme et la singularité (5).

 

Justification de la question de recherche :

Les recommandations de l’HAS concernant l’ETP mettent l’accent sur le lien entre l’amélioration des compétences d’adaptation, la prise en compte des représentations et des affects des patients et la qualité de vie de la personne malade : en d’autres termes, renforcer les compétences d’adaptation des personnes malades et prendre en compte leurs représentations et affects contribuent à améliorer leur vie quotidienne avec la maladie.

Actuellement, le champ des compétences d’adaptation et celui des représentations et des émotions est peu exploré dans les programmes d’ETP par les équipes soignantes. Si les soignants repèrent des besoins, ils se sentent souvent démunis pour « en faire quelque chose ». Aussi nous proposons d’investir un espace et un temps en soutien à la démarche d’ETP existante. Une fois les besoins exprimés et repérés au sein du diagnostic éducatif (6), une fois les compétences d’adaptation à acquérir et les représentations et les émotions à travailler définies avec le patient dans une l’alliance thérapeutique, nous souhaitons accompagner la personne dans cet apprentissage, ce cheminement. Nous parlons ici d’outils et de méthodologie à visée d’autonomisation de la personne malade. Nous souhaitons également que ces temps là puissent contribuer à maintenir et développer le lien de confiance de la personne malade avec l’équipe soignante.

 

Les activités créatives sont reconnues aujourd’hui pour leurs bénéfices dans la santé. Un numéro spécial du Lancet de 2006 « Medecine and creativity » (7) montre le lien entre différentes approches créatives (théatre, écriture, chant, clows, jardin thérapie…) et la santé des patients. L’évaluation des effets positifs de l’art thérapie conforte cette tendance (8). « Dans la plupart des cas, la leçon de piano ou de peinture sert à enclencher le mouvement ; de nouveaux espaces s’ouvrent en soi quand on utilise de tels outils d’expression et de croissance… De nouvelles convictions se développent à partir de ces expériences nouvelles. Elles viennent remplacer les anciennes croyances et, en utilisant ces sensations neuves comme tremplin, on trouve le courage de changer bien des choses» (9).

Or les personnes atteintes d’une maladie chronique n’osent pas forcément s’inscrire dans un groupe où tout le monde va bien, par peur d’être confrontées à leurs limites et au regard de l’autre : « Il ne suffit pas de dire : « fait du chant! »   Il faut s’inscrire à un groupe ! On ne sait pas où aller, si on peut le faire ! C’est compliqué d’aller dans un groupe où tout le monde va bien. On a besoin de prendre confiance» (Maman atteinte de mucoviscidose).

 

La question qui se pose est : en quoi l’accompagnement de la personne atteinte de maladie chronique ou de handicap – ainsi que son entourage - par des activités médiatrices créatives et des temps de rencontre, peut-il lui permettre d’ajuster son nouveau parcours de vie avec la maladie ou le handicap pour mieux vivre au quotidien ?

 

La recherche consistera à mesurer d’un point de vue qualitatif et quantitatif les effets produits par la pratique de ces activités et de mettre en valeur des invariants qui sont à l’origine de cette amélioration.

 

Objectifs du projet :

A partir de la mise en œuvre des activités médiatrices et créatives en soutien à un programme d’ETP, les objectifs principaux de cette recherche sont de :

- évaluer les bénéfices (améliorations, progrès) et inconvénients perçus de différentes médiations créatives

- repérer les impacts de ces médiations créatives sur les compétences, représentations et affects des patients ou de son entourage

- repérer les invariants des différentes médiations créatives à l’origine de cette amélioration

 

Population étudiée

Au total, 10 pathologies chroniques de santé sont concernées : mucoviscidose; VIH ; diabète ; insuffisance respiratoire sévère/ BPCO ; dermatite atopique ; allergie alimentaire ; asthme ; troubles sphinctériens ; patients transplantés rénaux/pancréas ; cancer.

Ce projet intéresse les enfants, les adolescents, les adultes atteints de maladies chroniques ainsi que leur entourage (parents, fratrie, conjoint, autre aidant).

L’offre des 11 médiations sera proposée aux patients selon ses besoins et ajustée selon ses préférences. 

Les 2 seuls pré-requis pour participer à ces activités et faire partie de l’étude, sont d’une part le volontariat et d’autre part d’être suivi par l’une des 12 équipes soignantes engagées dans un programme d’ETP, ayant répondu favorablement à ce projet de recherche.

Au total, une soixantaine de personnes participeront à ces activités médiatrices créatives sur une année.

 

Sélection et exclusion des sujets

Une vigilance sera de mise quant au recrutement des patients pour bien orienter les patients vers les bonnes médiations. Chaque intervenant des médiations créatives identifiera en amont avec les soignants les critères « contre indiquant » son inscription à son atelier (personnes pouvant être mises en difficulté par le groupe ou par la médiation). 

 

Méthode employée (critères principaux et secondaires, intervention éventuelle, organisation de l’étude et de la passation du cahier d’observation, outils d’analyse des donnée envisagés….)

Ce projet s’inscrit dans le cadre d’une recherche-action. Il s’agit d’« une recherche dans laquelle il y une action (intervention) délibérée de transformation (changement) de la réalité, recherche ayant un double objectif : transformer la réalité et produire des connaissances concernant ces transformations » (5).

Les effets d’une intervention peuvent être appréciés à différents niveaux, allant de la satisfaction des patients aux finalités d’amélioration de l’état de santé du patient, et de sa qualité de vie. Les évaluations inspirées des modèles d’évaluation des sciences de la santé et de la clinique, appliquant des dispositifs quasi ou strictement expérimentaux (groupe contrôle-groupe expérimental …) pertinents pour des essais thérapeutiques simples, ont montré leurs insuffisance à rendre compte d’interventions complexes comme le sont les actions éducatives (10). Campbell et al (2000) ont comparé les exigences des interventions complexes en matière d’évaluation et ont également conclu à la non-pertinence, dans certains cas, des dispositifs classiques tels que les essais randomisés contrôlés ». Ils recommandent les évaluations répétées (séries temporelles) et l’association d’évaluations qualitatives et quantitatives (10). Nous souhaitons développer cette approche.

 

Le groupe de pilotage de recherche (10 personnes) s’engage ainsi à se réunir 8 fois sur l’année pour :

-          concevoir le protocole et les outils opérationnels de la recherche (évaluation des effets)

-          ajuster la méthodologie après les prétests et les journées d’analyse de pratique trimestrielle

-          valoriser les résultats de cette étude : co-écriture d’article

 

Le groupe de coordination constitué (2 membres de l’UTET du CHU de Nantes, et la coordinatrice du projet rattachée à l’UTET) s’engage à :

- organiser la mise en œuvre des activités créatives (11 médiations différentes)

- coordonner l’information des soignants et des patients et les inscriptions aux médiations

analyser et interpréter les résultats : analyse qualitative et quantitative (description des évolutions)

- organiser les différentes rencontres soignants/intervenants de la Fabrique (information du projet, journées trimestrielles d’analyse de pratiques, bilan du projet…)

- organiser la mise en œuvre de l’évaluation (entretiens individuels avec les patients à différents temps, utilisant les outils construits par le groupe de pilotage de la recherche, entretiens avec les intervenants et soignants)

- communiquer sur le projet : écriture d’un article, participation à des congrès

 

Le groupe des intervenants de la Fabrique (14 intervenants-animateurs des activités médiatrices) s’engage à :

- réaliser son cycle prévue de séances créatives sur l’année (11 médiations différentes)

- participer aux réunions régulières avec les soignants et les autres intervenants de la Fabrique

 

Des critères principaux :

1.      Bénéfices perçus de la médiation créative expérimentée par les patients ou leur entourage

2.      Inconvénients perçus de la médiation créative expérimentée par les patients ou leur entourage

 

 

Des critères secondaires :

Le groupe de recherche priorisera les critères de recherche parmi les compétences d’adaptation et les représentations et états émotionnels des participants.  A titre d’exemples, voici quelques critères qui seront discutés :

 

A)      Compétences d’adaptation des patients, avec un renforcement des compétences :

  1. Savoir gérer ses émotions et gérer son stress

- comment gérer son stress (quotidien lié au traitement, l’alimentation… ou lié à une situation imprévue) ?

- comment mieux vivre son sentiment d’incertitude vis-à-vis de l’avenir (sentiment d’insécurité) ?

- comment apprivoiser ses peurs liées à la mort, à la dégradation du corps ?  

- comment prendre de la distance avec ses proches (parents, aidants…), devenir responsable et autonome sur ses soins et dans sa vie (peurs sur ce qu’il va devoir gérer tout seul) ?

- comment gérer ses besoins liés à la période de l’adolescence sans « trop » nuire à sa santé ?

- comment « accepter», et « assumer » sa différence devant les autres (différences visibles et invisibles) ?

- comment gérer sa peur du rejet de l’autre ?

- comment cesser de culpabiliser ?

- comment gérer un rythme trop chargé au quotidien pour tenir sur la durée ? Comment se ressourcer ?

- comment gérer ses propres émotions devant les autres (parents, amis, soignants…)? - comment exprimer, verbaliser sereinement ses émotions à son entourage ?

- comment se protéger des émotions des autres ?

- comment « lâcher prise » ?

 

2. Savoir communiquer, être habile dans ses relations avec les autres

- comment trouver un équilibre satisfaisant entre ni trop en parler ni pas assez ?

- comment informer et former son entourage : parler de sa maladie sans faire peur aux autres mais sans minimiser ?

- comment parler de sa maladie : que dire, à qui, quand ?

- comment exprimer nos besoins à notre entourage, aux professionnels ?

- comment demander de l’aide (Utiliser les ressources du système de soin) ?

- choisir d’en parler ou pas ; comment ne pas parler de notre maladie à certaines personnes (ou certains groupes) ?

- comment se faire respecter dans ses différences, dire non, résister aux pressions des autres ?

- comment gérer les émotions des autres (petit ami…) ? comment gérer les réactions des autres ?

- comment maintenir et développer ses relations aux autres, bien s’entourer ?

- comment gérer les désaccords, conflits au sein de la famille ?

- comment renforcer son estime de soi ?

- comment aider ses proches à mieux vivre sa maladie ?

                       

3. Résoudre des problèmes, prendre des décisions, faire des choix

- comment trouver un équilibre entre la nécessité de se soigner (respecter les contraintes) et le besoin de vivre comme tout le monde (profiter de la vie) ?

- comment donner la « juste » place à la maladie (le temps des soins) dans le temps de vie ?

- comment anticiper ou gérer un ras-le-bol, un arrêt du traitement ?

- comment faire des choix importants en prenant en compte la maladie ?

- comment gérer l’attente ?

- comment gérer son organisation quotidienne pour intégrer les soins, le suivi?

 

B)      Représentations des patients (qualité de vie, santé globale, besoins fondamentaux).

avoir un regard plus positif :  

- sur la maladie : limites perçues, opportunités, problèmes et difficultés perçues, solutions perçues, sens mis sur la maladie, «acceptation» de la maladie

- sur le traitement: Inconvénients, effets secondaires, contraintes, craintes, freins, infaisabilité perçue, bénéfices, importance et efficacité perçue, faisabilité perçue, sens mis sur le traitement, motivation à suivre son traitement

- sur la relation aux soignants et aux autres : plaintes, (in)satisfaction de la prise en charge, sentiment d’isolement, de solitude, soutien social perçu, besoin d’appartenance : « être en lien » (identité sociale), besoin de reconnaissance (identité personnelle) sentiment d’être mieux compris, mieux soutenu (moins jugé, culpabilisé), sentiment d’être respecté dans sa personne, sa singularité, d’être plus en confiance relation plus personnelle, moins anonyme)

- sur lui-même : estime de soi, sentiment de compétence, conscience de ses ressources, réussites perçues (comportements favorables, stratégies bénéfiques), sentiment d’être moins passif, plus acteur dans sa santé, sentiment d’avancer, état émotionnel (moral perçu, anxiété, plaintes…), besoin de plaisir, besoin d’autonomie, besoin de créativité, besoin d’apprentissage

- sur l’avenir (réalisation de projets : voyages…)

 

Réflexion sur les questions éthiques soulevées par la recherche (voir « remarque importante » page 6)

 

> Exigence de compétence et de rigueur professionnelles :

- Le projet est piloté par une équipe de coordination constituée de trois personnes : médecin en santé publique et ingénieure en éducation thérapeutique formée à l’éducation thérapeutique, et une coordinatrice.  

- La constitution d’un groupe de recherche pluriprofessionnel multidisciplinaire pour co-construire le projet de recherche impliquant les associations de patients

- Les 12 équipes soignantes ayant répondu favorablement à ce projet de recherche :

  • ont une expérience importante en éducation thérapeutique
  • sont déjà engagées dans des groupes de travail locaux ou nationaux et/ou des projets de recherche
  • sont des équipes « alliées »  qui ont déjà travaillé ensemble et sont très motivées dans l’amélioration de leurs pratiques en éducation thérapeutique

- Un partenariat fort entre les équipes soignantes et l’équipe de l’UTET (Unité Transversale d’Education Thérapeutique) du PIMESP (Pôle d’Information Médicale et d’Evaluation en Santé Publique) du CHU de Nantes (analyses de pratiques,

- Une vigilance accrue sera portée sur l’expertise des acteurs de la Fabrique Créative de Santé : chaque professionnel et chercheur est formé et compétent dans son champ d’expertise. Les intervenants de la Fabrique Créative de santé sont diplômés et reconnus dans leurs différentes pratiques créatives qu’elles animent avec les patients.

- Des temps de rencontre entre soignants du CHU et les intervenants de la Fabrique Créatives sont prévus pour former les intervenants aux caractéristiques des pathologies (précautions et contre-indications éventuelles).

- Nous prévoyons une rencontre trimestrielle d’analyse de pratiques animée par une psychologue avec tous les intervenants de la Fabrique Créative de Santé afin d’aborder les difficultés rencontrées et d’ajuster le projet si nécessaire.

- L’attention sera portée sur le développement et le maintien qualitatif du lien entre l’UTET de Nantes, les intervenants de La Fabrique de la Santé et les services du CHU de Nantes concernés par les maladies chroniques. Des comptes rendus écrits aux équipes de soins seront réalisés par les intervenants pour les informer de l’évolution des participants.

 

> Pertinence du choix du thème de la recherche

En lien avec les recommandations de l’HAS et l’INPES de 2009 où il est stipulé que :

- l’amélioration de la qualité de vie de la personne atteinte de maladie chronique va de pair avec la prise en compte et le développement de deux champs de compétences (auto-soins et adaptation)

- ces deux compétences doivent être prises en compte aussi bien dans l’analyse des besoins, de la motivation du patient et de sa réceptivité à la proposition d’une ETP, que dans la négociation des compétences à acquérir et à soutenir dans le temps, le choix des contenus, des méthodes pédagogiques et d’évaluation des effets.

Nous proposons d’investir un espace et un temps en soutien au diagnostic éducatif, et ce dans une démarche de recherche qualitative.

 

> Réflexion sur l’information et le recueil du consentement du patient

L’accent sera également mis sur le lien entre les différents partenaires de ce dispositif. Il va s’agir de développer entre les différentes équipes (soins, activités, chercheurs, coordination) et la personne malade une cohérence au service du programme d’ETP.

Seront organisées :

- des réunions d’information auprès des équipes soignantes et les patients concernés

Ont été rédigées :

- une notice d’information du patient et des brochures présentant Fabrique Créative de Santé et chacune des médiations créatives (cf annexes) 

- une charte de consentement du patient (cf annexes) 

 

> Evaluation et prise en compte des conséquences de la recherche pour le patient

Il s’agira d’évaluer de manière qualitative le processus du projet pour identifier à terme les freins et leviers facilitant la mobilisation des compétences d’adaptation, l’évolution des représentations des patients et plus globalement l’amélioration de la vie de la personne malade avec sa maladie. L’analyse de ce processus exige implicitement de décrire et comprendre la mise en place de l’expérimentation, son développement et les ajustements susceptibles de se produire au cours du temps.

L’évaluation du projet repose sur plusieurs indicateurs :

- Description détaillée de l’ensemble du processus réalisé : Nombre de réunions de travail, nombre de patients/parents impliqués dans la Fabrique créative de Santé, nombre de séances et de patients par médiation créative, nombre de soignants impliqués dans ce travail, etc

- Degré de satisfaction des différents acteurs impliqués dans ce travail (patients/parents, soignants, experts, chercheurs) concernant les  différentes étapes du processus

- Analyse des facteurs de succès et/ou d’échec : un temps d’analyse des tensions, difficultés vécues au cours du processus de recherche sera réalisé auprès de l’ensemble des acteurs ayant travaillé ensemble : les facteurs facilitants et les freins seront identifiés par les patients/parents et les soignants ayant influencé ce travail de co-construction et de mise en œuvre d’une Fabrique Créative de Santé.

- Une analyse des conditions de mutualisation et de généralisation à d’autres programmes de cette démarche permettra de définir les conditions nécessaires pour impliquer d’autres équipes dans d’autres maladies chroniques.

 

> Réflexion sur les adaptations méthodologiques éventuelles

La méthodologie globale ainsi que la méthodologie d’évaluation, comme tout processus, fera l’objet d’ajustements au fil du temps (cf. point précédent).

Des rencontres régulières avec le comité de pilotage de recherche permettront de faire des points réguliers pour ajuster la méthodologie de la recherche–action aux difficultés rencontrées (prétests des outils d’évaluation).

Une vigilance sera portée sur :

- l’intégration de la recherche dans le projet pluridisciplinaire de soin du patient

- le pré-requis que cette recherche s’adresse à des patients qui sont pris en charge sur le plan médical par les équipes soignantes et qui ont déjà intégré un programme d’ETP

- le fait que cette recherche concerne l’ensemble de l’équipe pluridisciplinaire intervenant auprès des patients et que les membres de l’équipe soient partie prenante du projet (participation éventuelle aux activités).

 

> Respect des principes généraux (bienveillance, autonomie, justice, proportionnalité)

- Autonomie et autodétermination : une attention sera portée sur le consentement du patient. Les présupposés des soignants, une relation d’influence voire de manipulation quant à sa participation à une médiation seront à éviter. Un temps sera laissé au patient pour réfléchir et donner son accord.

Les soignants exprimeront aux patients le principe du volontariat avec une transparence des objectifs de la Fabrique créative de Santé.

- Bienveillance : il n’existe aucun conflit d’intérêts dans ce projet. Il n’y a aucun financement de laboratoire pharmaceutique. Ce projet n’a aucun but lucratif.

- Non maltraitance : une vigilance sera portée sur les risques potentiels de ce projet vis-à-vis des patients comme des intervenants de la Fabrique. La prise en compte des limites de chacun permettra d’ajuster le projet si besoin. Les temps réguliers d’échanges, d’analyse de pratiques chercheront à faire émerger les difficultés de chacun.  

Une charte de confidentialité pour tous les intervenants de la Fabrique Créative de Santé (cf annexes) 

- Justice sociale : un remboursement des frais de transport pour les patients ne pouvant se le permettre sera possible. Les personnes en situation de précarité ou de vulnérabilité sociale seront prioritaires pour s’inscrire aux ateliers.

- Responsabilités partagées : Un cas de patient en difficulté ou en échec thérapeutique,  questionnera les responsabilités de chaque acteur impliqué dans sa prise en charge. Une attention à éviter une éventuelle sur-responsabilisation et culpabilisation des patients comme des intervenants sera portée.

- Complexité : l’éthique du doute impliquera une vigilance permanente au fil du déroulement du projet et l’accueil de remises en questions si nécessaire. L’incertitude sera préférée à la pensée unique et au dogmatisme.

Une charte éthique pour tous les intervenants de la Fabrique Créative de Santé a été rédigée (cf annexes) 

 

Calendrier prévu

 

1)        Constitution d’une équipe de coordination : Anne Le Rhun, Catherine Greffier, Anne Rivalland (sept.2011)

2)        Identification des médiations créatives, des intervenants des médiations (sept. 2011- mai 2012)

3)        Organisation et mise en œuvre de réunions de communication du projet auprès des équipes soignantes et personnes atteintes des maladies chroniques concernées (juin-sept. 2012)

4)        Constitution d’un groupe de pilotage de recherche, groupe de travail pluriprofessionnel et multidisciplinaire (soignants, pédagogues, chercheurs et patients/parents ressource) afin de co-construire le protocole de la recherche et ses outils opérationnels (sept-oct  2012)

5)        Prétest des outils d’évaluations et ajustement du protocole de recherche (oct-dec 2012)

6)        Organisation des prestations des 11 médiations selon les demandes des patients et arrêt  lorsque le plafond du financement est atteint (37000 euros) (sept. 2012- dec 2013)

7)        Organisation et mise en œuvre de 3 réunions d’analyse de pratique (trimestrielle) afin d’accompagner les professionnels intervenants de la Fabrique Créative de Santé (psychologue) (sept. 2012- dec 2013)

8)        Mise en œuvre de l’évaluation avant, au cours, et à la fin de la médiation créative (entretiens) (sept. 2012- dec 2013)

9)        Analyse qualitative, synthèse des informations recueillies et restitution aux participants et soignants (sept. 2012- févr 2013)

10)    Evaluer l’impact de cette recherche-action sur les patients et soignants et les facteurs de reproductibilité de ce travail pilote (freins, facteurs facilitants, stratégies…). Une attention sera portée sur la gestion du secret professionnel (sept. 2012- févr 2013)

11)    Communiquer sur cette expérience : rédaction d’article et communication aux congrès nationaux et internationaux (janv 2013-mars 2013)

 

Dans les perspectives de cette étude, il est possible avec l’aide de l’UTET de mutualiser ce travail aux autres équipes du CHU de Nantes impliquées dans d’autres programmes d’éducation thérapeutique.

 

Retombées attendues au plan scientifique et en termes de santé publique

-          Pertinence : enrichir la compréhension des ressorts de différentes médiations créatives pour clarifier ses leurs « indications » dans le cadre des maladies chroniques

-          Qualité : promouvoir une éducation thérapeutique « créative » enrichissant le volet d’accompagnement psychosocial des programmes d’ETP existants et sensibiliser les soignants aux bénéfices de ces médiations créatives

-          Equité-Accessibilité : permettre à certaines personnes en ayant besoin, de bénéficier d’un accompagnement auquel elles n’avaient pas accès (situation de précarité sociale, réticences à aller voir une psychologue…)

Efficience : évaluer la faisabilité d’intégrer un tel projet dans un CHU et évaluer les conditions de sa généralisation à d’autres structures.